Vendredi 27 novembre 2015
L. Cerino / REA
Les dispositions de la loi Macron relatives aux chambres de commerce et d’industrie (CCI) et aux chambres de métiers et de l’artisanat (CMA), qui avaient été censurées par le Conseil constitutionnel, sont réintroduites dans un projet de loi et une ordonnance. Objectif : poursuivre la rationalisation de ces réseaux et leur mise en conformité avec la réforme territoriale. Une autre ordonnance fait évoluer le réseau des chambres d’agriculture.
Un projet de loi et deux ordonnances ont été présentés au conseil des ministres du 25 novembre 2015 pour faire évoluer l’organisation des réseaux de chambres de commerce et d’industrie (CCI), des chambres de métiers et de l’artisanat (CMA) et des chambres d’agriculture. Ces adaptations sont en partie dictées par la nouvelle organisation territoriale issue des lois du 16 janvier 2015 et du 7 août 2015, comme le rappelle le ministère de l’Économie à l’origine du projet de loi et de l’ordonnance relatifs aux CCI et aux CMA avec le secrétariat d’Etat chargé du commerce et de l’artisanat et le ministère de l’Agriculture auteur de l’ordonnance relative aux chambres d’agriculture.
Les dispositions relatives aux CCI et aux CMA figuraient dans la loi Macron pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances adoptée le 10 juillet 2015, et qui avaient été retoquées par le Conseil constitutionnel le 5 août pour des raisons de procédure (la loi Macron n’était pas le bon véhicule législatif pour de telles mesures). Depuis la décision du Conseil, les deux réseaux consulaires souhaitaient qu’une nouvelle loi soit votée au plus vite. “L’urgence était réelle”, explique André Marcon, président de CCI France à Localtis. “La censure du Conseil constitutionnel a stoppé net la plupart des projets de rapprochement de CCI. Aujourd’hui, chaque région a besoin d’une ou plusieurs de ces dispositions pour poursuivre leur rationalisation. L’organisation des futures élections consulaires prévues en novembre 2016 nécessite de fixer les règles au plus tard en mars 2016. Plus vite les nouvelles règles entreront en vigueur, plus nous serons en capacité d’organiser sereinement les élections dans le cadre des nouvelles grandes régions” (voir aussi ci-contre notre interview d’André Marcon du 18 novembre). D’après l’entourage d’Emmanuel Macron, “le projet de loi sera soumis à l’examen de l’Assemblée nationale au cours des prochaines semaines et l’ordonnance sera publiée dans les prochains jours puis soumise à la ratification du Parlement”.
Des textes très attendus
Le président de l’Assemblée permanente des chambres de métiers et de l’artisanat (APCMA), Alain Griset est sur la même ligne que son homologue des CCI : “Ces textes étaient très attendus car notre organisation est prête pour être en ordre de marche au 1er janvier 2016”, confie-t-il à Localtis. Le projet de loi modifie le code de l’artisanat en ouvrant aux chambres départementales la possibilité de se regrouper en chambre de métiers et de l’artisanat interdépartementale (CMAI). Les chambres régionales de métiers et de l’artisanat (CRMA) disposent de chambres de métiers et de l’artisanat départementales (CMAD) et de CMAI. “Nous aurons une chambre par grande région (13) et au niveau infra, environ 77 chambres départementales. En Midi-Pyrénées-Languedoc-Roussillon, par exemple, nous aurons une chambre régionale et 13 chambres départementales”, précise Alain Griset.
D’autre part, le projet de loi renforce au sein des CCI le mouvement de rationalisation et de mutualisation des fonctions support (comptabilité, gestion…) au niveau régional mises en œuvre depuis 2010, en instituant un schéma régional d’organisation des missions dans chaque CCI de région (CCIR). Le projet poursuit aussi la rationalisation du réseau en conférant “un caractère opposable” aux schémas directeurs, adoptés par les CCIR pour déterminer la carte consulaire de leur circonscription, “ce qui permettra, après concertation, d’atteindre l’objectif de réduction du nombre d’établissements publics tout en maintenant les missions de proximité”, précisent les ministres dans leur communication en conseil des ministres. “En deux mandatures, nous passerons de 150 CCI territoriales à moins d’une centaine en 2017”, précise l’entourage du président de CCI France. “Dès la prochaine mandature, fin 2016, les CCIR correspondront aux 13 nouvelles régions et des dizaines de CCI devraient fusionner par décision des élus sans pour autant renoncer à l’exigence d’un service de proximité pour les entreprises, qui est inscrit dans notre ADN.” L’APCMA poursuit le même objectif de rationalisation : “Nous avons déjà mutualisé de nombreuses fonctions support mais sans toucher aux services aux entreprises qui est notre priorité absolue”, souligne Alain Griset.
Le projet de loi devrait par ailleurs améliorer la représentativité de chaque CCI territoriale, locale ou départementale d’Ile-de-France au sein de chambres plus vastes en augmentant le nombre d’élus et en leur permettant d’être représentés au sein de leur CCIR de rattachement en proportion de leur poids économique.
Être prêts pour le 1er janvier 2016
En ce qui concerne l’ordonnance, destinées à mettre en application certaines dispositions plus rapidement que par la loi, elle permet aux CCIR qui le souhaitent, ainsi qu’aux CCIT qui leur sont rattachées, de fusionner dès le 1er janvier 2016 pour mettre en conformité leur organisation avec celles des nouvelles régions, sans attendre les élections des membres des CCI prévues en novembre 2016. Cette mesure permettra par exemple aux deux régions consulaires normandes de fusionner en début d’année 2016. André Marcon appelle d’ailleurs ce texte “l’ordonnance Normandie”. Mais d’autres régions du réseau sont prêtes à se regrouper comme “en Rhône-Alpes où la CCI de Lyon va fusionner avec les CCI de Saint-Étienne et de Roanne”, précise le président de CCI France.
L’ordonnance contient également des dispositions permettant au réseau des CMA de disposer d’une seule chambre de niveau régional comme interlocuteur unique du Conseil régional dans les sept régions fusionnées. Le choix de la forme juridique de la nouvelle chambre de niveau régional devra être décidé au plus tard le 31 janvier 2016 par les élus, qui seront également renouvelés fin 2016. Le périmètre actuel des CMA de niveau régional est maintenu jusqu’au 31 mars 2016.
Les chambres d’agriculture rénovées
Quant aux chambres d’agriculture, elles sont visées par une ordonnance spécifique qui a été présentée par le ministre de l’agriculture à leur demande. “L’Assemblée permanente des chambres d’agriculture a fait part de sa volonté de mise en conformité de ses établissements au 1er janvier 2016, date d’entrée en vigueur de la réforme territoriale”, précise le ministre dans sa communication. Les actuelles chambres seront regroupées sur le modèle de la nouvelle carte régionale. Un décret complètera l’ordonnance.
Une disposition spécifique de niveau législatif est en outre nécessaire pour traiter le cas particulier de l’Alsace et du Nord-Pas-de-Calais, dans lesquelles existe une “chambre de région” qui cumule les compétences de chambres départementales et d’une chambre régionale. L’ordonnance prévoit la scission de ces deux chambres de région, dont une partie est érigée en chambre régionale de droit commun et l’autre partie est transformée en chambre interdépartementale.
Valérie Grasset-Morel
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